Créa’livres : écrire avec les écrivains pour que les petits auteurs deviennent des grands, 59370

Créa’livres : écrire avec les écrivains pour que les petits auteurs deviennent des grands, 59370

Valère Staraselski dédicace à chaque écrivain en herbe de l’atelier qu’il a animé un exemplaire de l’oeuvre collective.

A la toute fin du XXe siècle a eu lieu la première édition de Créa’livres avec un seul auteur, Didier Daeninckx et une seule classe, celle d’Alain Chevalier, toujours présent au poste. Puis, elle est montée en puissance pour atteindre son rythme de croisière. Cette année sera la 23ème édition de cet évènement, sans équivalant dans l’Hexagone.

Le principe de Créa’livres est de faire écrire

et éditer un petit livre par les élèves d’une classe d’une école primaire, encadrée par un écrivain professionnel. En cette année 2022, huit classes des écoles primaires Montaigne, Ronsard, Provinces, La Paix, Sévigné, Hélène Boucher de Mons-en-Barœul participent au projet… soit plus de 200 élèves. A cause de la pandémie, Créa’livres avait dû s’interrompre deux années de suite. Cette édition 2022 était attendue. Créa’livres est surtout visible au mois de juin, lorsqu’à la fin de l’année scolaire, les classes impliquées dans le projet, leurs enseignants et leurs écrivains-accompagnateurs invitent, salle Allende, les autres élèves, les parents et les élus à un spectacle reprenant les thèmes des textes produits tout au long de l’année. Il s’y mêle la photo, la vidéo, les arts plastiques, le théâtre… et bien entendu l’écriture. Ces après-midi de début juin, bénéficient d’une véritable salle de spectacle avec sono et jeux de lumières. 

Présentation d’un projet.

C’est toujours un très bon moment pour les invités. La motivation des enseignants et de leurs élèves, l’action bénévole de beaucoup, le soutien de la commune, ont, jusqu’ici, permis le succès de cette manifestation simple et géniale. Cet instant magique est la concrétisation d’un travail d’écriture de longue haleine. Il se déroule pendant la plus grande partie de l’année scolaire. Il faut choisir les thèmes, se documenter… dans les livres et l’Internet, faire des enquêtes et des photos sur le terrain et bien sûr écrire les textes en suivant les conseils avisés d’un véritable professionnel. Une des marques de fabrique de Créa’livres est la production pour chaque projet d’un véritable livre imprimé avec soin. Chaque élève ayant participé à l’écriture peut emporter un exemplaire de son œuvre  avec une dédicace de l’écrivain qui a encadré leur projet : un grand souvenir pour toute la vie…

La distribution des livres dans une classe de CM2.

Un projet d’écriture : « Louis Cnudde, un instituteur en avance sur son temps », école Hélène Boucher, 59370

Louis Cnudde et sa classe de l’école Rollin de Mons-en-Baroeul en 1945

La classe de CM1-CM2 de Monsieur Fermen – le directeur de l’école Hélène Boucher- avait choisi d’écrire les textes de leur livre à partir d’un personnage qui a réellement existé. Il s’appelait Louis Cnudde. Il a été le directeur de l’école Rollin de Mons-en-Barœul et effectué une carrière d’enseignant du début des années 1930 à la fin des années 1950. Cet instituteur était plutôt « haut en couleurs ». Il pratiquait des méthodes pédagogiques que, parfois, il avait inventées et qui n’étaient pratiquées nulle part ailleurs. Louis Cnudde était un adepte des classes-découvertes. Il emmenait volontiers ses élèves dans la campagne environnante pour observer la nature ou dans les administrations et entreprises pour qu’ils aient une idée des réalités professionnelles. En ce sens, il était un précurseur. Il se montrait proche de la pédagogie Freinet mise en œuvre aujourd’hui à l’école Hélène Boucher. Voir la grande silhouette de l’instituteur, suivi de trente préados, déambulant les rues de la ville surprenait les Monsois du milieu du XXe siècle. Un brin goguenards, ils appelaient ces équipées « les classes-promenade de Monsieur Cnudde ». 

Louis Cnudde et quelques élèves devant l’école Rollin en 1945

Mais, comme le niveau des élèves et les résultats au certificat d’étude étaient bons, cela n’allait guère plus loin. Louis Cnudde, en même temps, était un instituteur « à l’ancienne ». Il s’exprimait depuis une estrade qui longeait le tableau noir. Il ne se départait jamais de son sifflet, identique à celui d’un agent de police, avec lequel il rétablissait l’Ordre à chaque fois que cela se révélait nécessaire. En 1945, avec ses élèves de la classe de Certificat d’études, Louis Cnudde et son épouse Gilberte avaient participé à un grand concours-photo organisé par le Ministère de l’Education Nationale.

Ainsi, grâce à ces images, beaucoup de lieux de la commune, qui ont beaucoup changé ou totalement disparu, nous sont-ils parvenus tels qu’ils étaient après-Guerre. Cette mémoire des deux enseignants mythiques est venue jusqu’à nous grâce à leur fils, Jean Cnudde. Il avait gardé pieusement tous les documents (photos, textes, articles) qui concernaient ses parents. Jean avait fait une carrière brillante dans l’Education Nationale et s’était illustré dans plusieurs domaines mais Il avait un péché mignon. C’était un fervent lecteur du journal local « La Voix du Nord » qu’il dégustait chaque matin, en même temps que son café. S’il était – via ses parents – le héros du jour des pages locales, c’était le prétexte de longues conversations avec ses voisines de la rue Pasteur.

Jean Cnudde

Ce sont ces textes, ces images, ces articles qui ont servi de point de départ aux élèves de la classe de CM1-CM2 de l’école Hélène Boucher pour se documenter sur l’école Rollin et Louis Cnudde. Ils ont pu aussi bénéficier du concours de Colette et d’Alain Chevalier pour se rendre sur place et voir ce qu’étaient devenus les lieux photographiés en 1945. Surtout, ils ont reçu l’aide experte de Valère Staraselski, écrivain professionnel, maintes fois primé et qui collabore à Créa’ livres, presque depuis le début. C’est comme cela qu’ils ont imaginé qu’à cause de la pendule de l’ancienne mairie dont les aiguilles se sont mystérieusement mises à tourner à l’envers, les élèves de la classe, remontant le temps, se sont retrouvés, en 1945, dans la classe de Monsieur Cnudde ou dans les différents lieux des photographies de l’exposition du Ministère de l’Education Nationale…

NB : on trouve également sur ce blog beaucoup d’articles qui concernent Jean et Louis Cnudde.

Un extrait de « Louis Cnudde, un instituteur en avance sur son temps »

« Arrivée dans le haut de la ville, la classe s’arrête devant l’ancienne mairie, située rue du Général de Gaulle. Monsieur Fermen se trouvait juste sous l’horloge de l’époque, fixée au fronton de la mairie au-dessus de la devise « Liberté, Egalité, Fraternité », quand tout à coup, un élève tendit la main en montrant l’horloge et se mit à crier : « Regardez, regardez, les aiguilles tournent à toute vitesse, elles sont devenues comme folles. »  Chacun tourne son regard vers les grandes aiguilles de l’horloge qui allaient de plus en plus vite dans le sens inverse du temps. Elles tournaient à l’envers ! Au même moment, un grand vent se leva, le soleil disparut derrière de gros et épais nuages noirs et le ciel vira au gris-cendre. Et sans qu’on sache comment, un puissant courant d’air jaillit du sol qui s’était fendu en deux, une véritable tornade, personne ne comprenait rien et avant de dire ouf, les élèves furent emportés. »

Galerie :

Pour aller plus loin et remonter le temps :

http://blog.prophoto.fr/monsieur-louis-cnudde-1902-1987-instituteur-et-directeur-de-lecole-publique-rollin/

http://blog.prophoto.fr/1945-la-campagne-photographique-des-eleves-de-lecole-rollin-et-de-louis-cnudde-leur-instituteur/

Alain Cadet, journaliste
Alain Cadet, journaliste

Il a débuté dans la vie professionnelle comme enseignant. Après avoir coché la case du métier de photographe, il s’est orienté vers la réalisation de films documentaires, activité qui a rempli l’essentiel de sa carrière. Arrivé à la retraite, il a fait quelques films… mais pas beaucoup ! Les producteurs craignent toujours que, passé 60 ans, le réalisateur ait la mauvaise idée de leur faire un infarctus, ce qui leur ferait perdre beaucoup d’argent ! La suite a montré qu’ils se sont peut-être montrés un peu trop frileux, mais cela fait partie du passé. C’est ainsi que l’ancien réalisateur – un peu photographe, sur les bords – s’est mis à collaborer avec différents journaux. Il a aussi écrit des livres sur la guerre de 1914 – 1918 où l’image a une place importante. C’est ainsi que dans ce blog, on trouvera beaucoup d’articles sur des peintres ou des photographes anciens ou contemporains, des textes relatifs aux deux guerres, mais aussi des articles opportunistes sur différents événements. Comme les moyens du bord sont très limités, cela a obligé l’auteur à se remettre à la photographie – sa passion de jeunesse – pour illustrer ses textes. Il ne s’en plaint pas !

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