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Le dernier voyage d’Henri Poissonnier, 1900 – 1945

Dès 1942, Henri Poissonnier, s’engage dans la résistance au réseau Voix du Nord. Il devient l’imprimeur du mouvement. Arrêté en 1944, Il va décéder le 28 février 1945 dans le camp de Vaihengen, dans le Bade-Wurtemberg.

Henri Poissonnier
Henri Poissonnier au début de la Guerre

Henri Poissonnier a fait partie du « Train de Loos », le dernier convoi parti de la région lilloise vers les camps de concentration allemands. 

On s’apprête à célébrer le 80ème anniversaire de cet événement tragique. Henri Poissonnier n’était pas un militant politique, soutenu par une idéologie. C’était plutôt un père de famille tranquille, toujours prêt à rendre service et respecté de ses voisins. Il aurait souhaité devenir photographe. Les quelques clichés de lui qui nous sont parvenus sont de très grande qualité. Finalement, il avait opté pour le métier d’imprimeur, plus sûr et plus rémunérateur. Il était devenu un employé modèle des imprimeries Liévin–Danel, à Lille, où il déployait un grand talent. Avec la ligne de tramway qui passait juste devant chez lui, l’atelier était à moins d’une demi-heure de son domicile de la rue Daubresse-Mauviez, à Mons-en-Barœul. Dans cette période d’Occupation, un imprimeur compétent était une denrée rare et utile. C’est ainsi qu’il va devenir membre du réseau Voix-du-Nord, très puissant dans la commune. Il va détourner des tickets de ravitaillement, imprimés chez Liévin–Danel, fabriquer de fausses pièces d’identité… et même de faux tampons qui permettent de multiplier les papiers falsifiés du réseau de Résistance… pour Lille et sa banlieue. Il va aussi créer la plaque de photogravure qui, à partir d’un dessin du journaliste Jean Piat, va servir à imprimer la têtière du journal clandestin La Voix du Nord, qui va apparaître à partir de mars 1942. 

La têtière version 1942, photogravée par Henri Poissonnier

Si la contribution d’Henri Poissonnier à la Résistance est indéniable, elle n’est connue que de très peu de gens. Un évènement fortuit va provoquer son arrestation. En 1944, un jeune résistant au STO (Service du Travail Obligatoire), du village d’Ascq, arrêté avec une fausse pièce d’identité, déclare sous la torture qu’il est possible que cette dernière soit l’œuvre d’Henri Poissonnier.

Le Résistant est arrêté et torturé mais n’avoue rien.

Les indices de son implication sont très minces. Il est condamné à neuf mois de prison, la peine minimale, ce qui indique que les juges allemands ne sont pas certains de sa culpabilité. Mais, en ce mois d’août 1944, l’armée allemande est en déconfiture. Les éléments les plus fanatisés de la police et de l’armée tiennent le haut du pavé. Ils décident d’envoyer vers les camps d’extermination les prisonniers politiques. Henri Poissonnier va faire partie de ce convoi. Ce sera son dernier voyage.

Le train de Loos, 1er septembre – 3 septembre 1944

Quittant la métropole lilloise, le 1er septembre 1944, juste avant sa libération, ce train était composé de prisonniers politiques de Résistants et de Juifs, enfermés à la prison de Loos.  Sur les 871 prisonniers déportés vers les camps d’extermination, seuls 275 retrouveront leur famille.

Un train en 1944

Dans le plus grand désordre, l’Armée allemande s’efforce de déporter le plus grand nombre de Résistants identifiés ou présumés vers les camps.  Le temps presse. Les voies ferrées et les gares sont bombardées par les Alliés. Ce train de Loos sera le dernier. Le lendemain, la Résistance belge fait sauter la dernière voie ferrée utilisable. Ce convoi est sécurisé par la division SS Hermann Goering, une unité d’élite, ce qui empêche toute attaque par la Résistance. Le 1er septembre, à17h30, le « Train de Loos » s’ébranle en direction de la Belgique et de la gare de Tournai. Il emprunte des voies détournées car beaucoup d’itinéraires plus directs ne sont pas sûrs. 

Le parcours sinueux du “Train de Loos”

On traverse la Belgique, puis on remonte vers le nord des Pays-Bas. : Courtrai, Gand, Utrecht, Groningen. Ensuite, on redescend vers le Sud pour, dans la nuit du 2 au 3 septembre, atteindre Cologne, en Allemagne.

Beaucoup de ces prisonniers n’iront pas plus loin.

Ils sont morts, entassés dans les wagons à bestiaux. Le surlendemain, les survivants vont être expédiés vers différents camps de concentration : Mülheim, Buchenwald… la plupart sont dirigés vers Sachenhausen. Beaucoup de ces prisonniers ne reviendront jamais. Près des deux tiers d’entre eux vont décéder en moins de six mois.

La libération du camp de Vaihengen, où est décédé Henri Poissonnier.

Pour accéder au précédent article sur le sujet :

http://blog.prophoto.fr/henri-poissonnier-resistant-1900-1945/