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Les détenus de la prison de Sequedin ne sont pas les amis du brouilleur d’ondes.
Les détenus de la prison de Sequedin ont manifesté leur mauvaise humeur afin de protester contre l’installation de brouilleurs d’ondes dans l’établissement.
Le brouilleur d’ondes est un dispositif technique visant à rendre inopérantes les communications sans fil des réseaux hautes fréquences et, en particulier, celles de la téléphonie mobile. Il peut viser une fréquence précise ou être multifréquence. Le principe en est simple : émettre sur la ou les fréquences visées un signal surpuissant… ce qui rend toute communication impossible. Leur usage, sans motif impérieux, a été interdit en en France en 2002 et la réglementation sur leur emploi a été renforcée en 2012. La possession illégale d’un « brouilleur » est théoriquement punie de six mois d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende, même si dans les faits la loi n’est jamais appliquée.
Ce qui justifie cette interdiction renvoie aux domaines de la santé et de la sécurité. Question pollution par le moyen des ondes électromagnétiques, le brouilleur d’ondes est un champion. La puissance de son signal va bien au-delà de ce peuvent produire les autres appareils existants.
Cet inconvénient n’était pas inconnu du Politique dans les années 2010 comme en témoigne la loi Abeille (2015) qui encadrait l’usage des ondes dans les établissements scolaires. Mais elle a été détricotée au fil des ans par le législateur. Sous la pression du lobby de l’industrie des ondes, les nuisances des champs électromagnétiques sur la santé du public ont disparu du champ politique et des médias.
Ainsi, on ne connaît plus guère les raisons de cette législation – plutôt sévère – qui encadre l’usage du brouilleur d’ondes. L’autre motif de lutter contre son usage relève du domaine de la sécurité et de la jouissance paisible des fréquences. Les possesseurs de brouilleurs, acquis de façon illicite, cherchent le plus souvent à rendre impossible leur géolocalisation par la police ou leur employeur. L’effet collatéral de cet usage inadéquat du brouilleur peut se traduire par des difficultés du système de guidage des avions dans les aéroports ou l’impossibilité de téléphoner et de communiquer avec l’antenne-relais la plus proche.
Le brouilleur d’ondes peut se révéler une entrave au commerce de Bouyghes, SFR, Free et consorts, c’est-à-dire un délit très grave.
C’est pourquoi l’utilisation du brouilleur est encadrée et soumise à une autorisation préfectorale. Seuls, la Police, la Sécurité intérieure, l’Armée, les ambassades et les prisons peuvent déployer un brouilleur pour garantir leur sécurité. Ainsi lorsque le 4 novembre dernier, le système de brouillage des communications téléphoniques a été activé à la prison de Sequedin (59) – à l’instar de celles Rennes et Vendin-le-Vieil – était-on dans l’application de textes, en vigueur depuis bien longtemps.
Mais, selon le journal local qui s’est emparé du sujet d’actualité, « la mise en service du dispositif ont donné lieu à des mouvements de détenus, des refus de réintégrer les cellules. Des sanctions disciplinaires ont été prises : les leaders ont été placées en quartier disciplinaire et d’autres transférés dans un autre établissement. » On découvre dans la même publication que les brouilleurs étaient sur place depuis deux ans, mais qu’ils n’avaient jamais été mis en service. Le journal soupçonne que la raison pourrait-être le rapport sénatorial de la commission d’enquête sur le narcotrafic qui conclut : « Il est urgent que l’incarcération redevienne capable de mettre les narcotrafiquants hors d’état de nuire. » Effectivement, diriger un réseau de narcotrafic où envoyer un tueur à gage à un concurrent, depuis une cellule de prison, via son Smartphone n’est pas acceptable !
Pourquoi la mise en service des brouilleurs, malgré des investissements importants, n’est-elle pas effective ?
Depuis 2018, le ministère de la justice a dépensé 125 millions pour brouiller les communications mobiles en prison. Le résultat n’est pas à la hauteur de l’investissement. L’administration pénitentiaire étant très discrète sur ses difficultés, il est très délicat d’en connaître les véritables raisons. Quelques études de cas ouvrent des pistes d’explication. Ainsi, à la prison de la Santé malgré un investissement important et l’installation de brouilleurs d’ondes dernière génération, la confiscation de 1200 smartphones pas an, le trafic de portables continue de plus belle. Les détenus se filment et postent des vidéos depuis leur cellule avec des téléphones introduits depuis l’extérieur.
A Marseille, aux Baumettes, la situation n’est guère plus satisfaisante tandis que les riverains dénoncent des coupures de réseau qu’ils attribuent au brouilleurs. Quel que soit le réseau et l’Opérateur, plus possible de passer un appel, même du jardin ! Le réseau wifi passant par la Box ne fonctionne pas. C’est gênant et même illégal, car il appartient à l’Etat de garantir à tout un chacun l’accès aux services d’urgence. Naturellement, à Sequedin, les effets collatéraux des brouilleurs sur les riverains seront moins sensibles qu’à Marseille ou à Paris mais la question de l’utilisation du brouilleur pour éradiquer les communications téléphoniques en prison est plus complexe que ce qu’en disent les « Fautqueyaka » des commissions parlementaires, des ministères et des riverains des prisons.
Naturellement, pas un mot sur les effets pervers des brouilleurs sur la santé : un problème que les personnels de l’Administration pénitentiaire, les Politiques et les journalistes semblent ignorer. Si le brouilleur d’ondes ne remplit pas ses promesses du point de vue de la sécurité, il est tout à fait indiqué pour rendre malades indistinctement prisonniers et gardiens
Histoires de brouilleurs :
http://blog.prophoto.fr/le-brouilleur-dondes-cest-chic-mais-cest-toxique/