Views: 27

Cérémonie en mémoire des victimes de la déportation

Cérémonie du 27 avril 2025.

Les déportés, victimes des crimes du régime Nazi, se dénombrent à 10 millions.  

En France, 166 000 personnes (dont 76 000 juifs) ont été déportées. 

Vivant à deux pas de ce monument, des Résistants de la commune ont été envoyés vers les camps. Ce fut le cas d’Henri Poissonnier qui habitait cette même rue du général de Gaulle et qui fut déporté dans le tristement célèbre « Train de Loos », le 1er septembre 1944. Il n’est jamais revenu. Un peu plus près, Jeanne Parmentier, cheffe de la Résistance, qui tenait le café voisin ; est arrêtée en septembre 1943. Elle est déportée en 1944. Elle reviendra en 1945, mais, affaiblie, elle décédera prématurément. Il me revient en mémoire cette phrase de sa fille Lily : « Vous savez, en septembre 1944, tout le monde était Résistant. Mais, en 1942, il n’y en avait que 20%. Les autres soutenaient le maréchal Pétain »… ce maréchal qui – dans la déportation des Juifs – allait bien au-delà de ce qu’exigeait l’Occupant allemand. Aujourd’hui, les héritiers spirituels du maréchal sont en première ligne sur les médias au secours d’Israël et pour dire que le maréchal Pétain a sauvé la vie de beaucoup de Juifs. Une espèce d’inversion de l’Histoire s’est produite. C’est une des raisons pour laquelle il est important de rendre hommage aux victimes de la déportation. 

Le discours de Rudy Elegeest, maire de Mons-en-Baroeul

Peut-être vous êtes-vous posé cette question : pourquoi la journée nationale du souvenir des victimes de la déportation a-t-elle été fixée au dernier dimanche d’avril ?

Pour y répondre, il faut nous replonger 80 ans en arrière. Avril 1945 marque la fin du système concentrationnaire du régime Nazi dont l’horreur absolue fut révélée progressivement au monde à partir de juillet 1944 avec la libération par l’armée rouge du camp de Majdanek, près de Lublin en Pologne.

Cette plongée en enfer se prolongea jusqu’à fin avril 1945. 

Le 11 avril 1945, Buchenwald est libéré par des unités de la 3éme Armée Américaine. 

Le 15 avril, les troupes britanniques et canadiennes entrent dans le camp de Bergen-Belsen où Simone Jacob (future épouse Veil), matricule 78651 et sa sœur étaient arrivées au terme des « marches de la mort » parties d’Auschwitz dans la neige en janvier 1945. 

Le 29 avril, les soldats de la 45éme division d’infanterie de l’armée Américaine pénètrent dans le camp de Dachau.

Leurs « libérateurs » pourtant endurcis par des mois de violents combats découvrent alors l’inimaginable. Ivan Martynouchkine, un fantassin russe qui se bat depuis 2 ans sur le front de l’Est confessait « un soldat ne peut pleurer pour chaque mort, ne peut souffrir de chaque destruction qu’il voit sinon il ne peut avancer. Mais ce que j’ai vu à Auschwitz était absolument épouvantable. Je ne souhaitais qu’une seule chose : en sortir au plus vite ».

Le général Eisenhower commandant suprême des forces alliées en Europe eut ces mots à l’adresse des troupes tentant désespérément de venir en aide aux survivants : « Si vous ne saviez pas pourquoi vous vous battez, maintenant, vous savez ! »

Non seulement, enfin le monde savait mais désormais le monde voyait sans pouvoir détourner le regard. Une vérité terrible, terrifiante venait d’éclater : la civilisation ne protège pas de l’horreur !

Depuis l’ouverture du premier camp, Dachau, en 1933 à la capitulation du régime nazi,  il y eut ceux qui ne voulaient pas savoir, ceux qui auraient pu savoir mais qui ne l’ont pas voulu, ceux qui faisaient comme s’ils ne savaient pas, ceux qui savaient mais qui pensaient qu’on n’y pouvait rien et surtout qu’il ne fallait rien dire, ceux qui auraient bien voulu ne rien savoir, ceux qui savaient et qui pensaient que le monde ne saurait jamais, ceux qui pensaient que le temps finirait par recouvrir ce qui finirait par être su…

Et il y eut, sur cette période, près de 10 millions d’hommes et de femmes victimes des crimes nazis : juifs, opposants politiques, résistants, tziganes, handicapés, prisonniers russes, travailleurs forcés, homosexuels…

Et il y eut, tous ceux, les survivants, les revenants dont les souffrances ne prirent pas fin en cette année 1945 pas plus qu’au cours des années suivantes, ceux qui n’oublieraient jamais tant l’épreuve avait pénétré leur être.

Il y a trente ans, le 16 juillet 1995, à la date anniversaire de la rafle du Vel’ d’hiv, Jacques Chirac, Président de la république Française, osait pour la première fois, confronter la honte des uns et les malheurs des autres, le sacrifice des uns et l’indignité des autres. Je cite « Il est, dans la vie d’une nation, des moments qui blessent la mémoire, et l’idée que l’on se fait de son pays. Ces moments, il est difficile de les évoquer, parce que l’on ne sait pas toujours trouver les mots justes pour rappeler l’horreur, pour dire le chagrin de celles et ceux qui ont vécu la tragédie. Celles et ceux qui sont marqués à jamais dans leur âme et dans leur chair par le souvenir de ces journées de larmes et de honte. »

Environ 166 000 personnes dont 76000 juifs ont été déportées de France vers les prisons et les camps nazis durant la Seconde Guerre mondiale. Ils ne sont que 48000 à être progressivement rapatriés à partir d’avril 1945.

Le 1er septembre 1945, le plus important des centres de regroupement, l’hôtel Lutétia à Paris ferme officiellement ses portes.  L’affreuse vérité s’impose, les autres, tous les autres, morts gazés, morts de faim, de froid, d’épuisement, de désespoir ne reviendront pas !

En plus de leur délabrement moral et physique, ils durent se faire à l’évidence que beaucoup de leurs proches s’étaient évaporés dans les fumées des fours crématoires. Ils eurent aussi l’amère révélation que leurs biens et propriétés avaient disparus ou que d’autres s’en étaient illégalement emparées. Très vite, ils comprirent à leur dépens que la spécificité de leur extermination planifiée serait rangée au rang indifférencié des dommages de guerre et qu’il n’était pas temps d’en parler : « tout le monde avait souffert » disait-on !

Avaient été aussi été déportés, c’est-à-dire soustrait sous la contrainte à leur famille, à leur communauté de vie, plus de 600 000 travailleurs dont de très nombreux jeunes gens d’une vingtaine d’années. Ils furent soumis à des cadences infernales (jusqu’à 72heures/semaine dans les derniers mois de la guerre) dans des conditions précaires (sous les bombardements alliés, mal nourris, surexposés aux accidents). Près de 30000 n’en reviendront pas !

Il y eut aussi tous ces combattants de l’armée des ombres, pétris d’idéal précipités dans l’obscurité déshumanisée des camps et qui, en cette année 1945, ont retrouvé la lumière. Leur résistance ne fut pas vaine, ils revenaient dans un pays libéré. Ils avaient risqué leur vie, vu la mort de près, elles les avaient épargné mais beaucoup manquaient à l’appel : le voisin de cellule, celui qui partageait le même châlit du même bloc, ceux qui, sans soins, succombèrent aux épidémies de thyfus, ceux qui furent torturés à mort …

Rien de tout cela, ne peut être ni occulté, ni excusé, ni diminué, ni falsifié, ni détourné, ni effacé.

A tous ces déportés, même s’ils ne sont plus là, même si leurs voix une à une se taisent, répétons inlassablement : non, nous ne vous oublions pas, oui nous porterons votre mémoire au-delà de vous-mêmes.

Laisser un commentaire