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Certains de nos concitoyens ont une vie légèrement différente à cause de leur handicap.
On les désigne souvent par des périphrases destinées à rendre plus présentable la réalité de leur quotidien : «personnes à mobilité réduite, déficients visuels etc.» En fait, ils s’adaptent, réinventent leur présent et tirent, le plus souvent, très bien leur épingle du jeu. Ils n’ont pas seulement besoin d’un équipement adapté mais aussi d’une relation fraternelle et de rapports égalitaires.
« Je suis gravement handicapé. J’ai des troubles importants de langage mais je me débrouille pas trop mal », prévient Michel Villalonga, 65 ans. Malgré un côté droit totalement paralysé et une jambe amputée, il parvient, en tirant de sa seule main valide un fauteuil de fortune, à sortir sa poubelle ou à tondre la haie de son petit jardin.
En 2005, il était menuisier, en fin de carrière, chargé de laquer et de poser les vernis sur les meubles et les éléments de décoration. Il travaillait le plus souvent sans masque… Simultanément il va être atteint d’un grave empoisonnement aux solvants et d’un AVC : il reste paralysé de tout un côté. En 2010, un second AVC le prive presque totalement du langage. Avec Zoé, son orthophoniste, à raison de trois séances par semaine, sa communication revient petit à petit. Pourtant, avant son accident, Michel parlait trois langues (le français, l’anglais et l’arabe). Sa vie ressemble à l’histoire d’un roman.
Michel naît en Algérie, près de Constantine. Sa mère est française et cultive la vigne. Il n’a jamais connu son vrai père et a été élevé par son père adoptif, un officier de la marine américaine. Grand voyageur, ce dernier maîtrise 5 langues. Abandonné par sa mère, Michel va être élevé par son beau-père et vivre aux États-Unis jusqu’à l’âge de 17 ans. Paradoxalement, c’est surtout outre-Atlantique, au Lycée français, qu’il apprend à maîtriser notre langue. Il est très sportif et fait du basket et de l’athlétisme comme tout jeune Américain. Revenu en Algérie, il s’occupe d’agriculture et continue la pratique du sport comme compétiteur et comme encadrant. Dix ans plus tard, à l’indépendance, il quitte l’Algérie. On le retrouve animateur sportif à Lyon, puis ouvrier dans une fabrique d’instruments du Jura et, enfin, accordeur de piano à Belleville sur Saône. Il a alors 37 ans et fait la connaissance de son épouse qu’il va rejoindre à Maubeuge. Il y sera quelque temps animateur socio-culturel avant de rejoindre Mons en Baroeul et la menuiserie.
Maintenant, Michel essaie de reconstruire sa vie, avec l’aide des personnels-soignants, à domicile. Son fauteuil, rudimentaire, rend ses déplacements compliqués. Malgré tout, parfois, il rejoint seul la rue du général de Gaulle : une véritable aventure. Il a entrepris des démarches compliquées pour pouvoir bénéficier d’un fauteuil adapté.
En attendant des jours meilleurs, Michel peaufine sa collection de timbres et relit ses livres sur les plantes et les fleurs. Il regarde aussi beaucoup la télévision : « j’aime beaucoup les documentaires sur les pays étrangers et les voyages », confie-t-il. Il imagine également des recettes de cuisine gourmandes qu’il dépose chez les commerçants et que l’on peut se procurer gratuitement.
Michel, a reçu, il y a peu, sa carte d’électeur. Il s’est mis d’accord avec un voisin qui possède une voiture pour pouvoir voter.