Vie et mort de la barre Coty, 59370

Vie et mort de la barre Coty, 59370

La barre Coty est un héritage de l’époque de la ZUP de Mons, le second programme immobilier des nouveaux quartiers.

On l’appelle ainsi parce qu’elle longe l’avenue René Coty. C’était l’usage, alors, de donner aux immeubles le même nom que la rue ou la place qui garantissaient leur accès. On avait le choix entre les noms de provinces, ou ceux des hommes politiques. Alors, pourquoi pas pour René Coty ! Evidemment, avec le temps, le nom est devenu légèrement désuet et peu d’habitants du quartier savent encore qui est René Coty. Le plan de masse de la ZUP de l’architecte parisien Henri Chomette s’organisait à partir de deux axes perpendiculaires : l’avenue Robert  Schuman et l’avenue Marc Sangnier. Comme il fallait de la place pour construire le centre de la nouvelle ville avec son énorme résidence de l’Europe, sa place et sa salle de spectacle, le boulevard Sangnier ne pouvait être prolongé.

On avait décalé l’axe – Nord-Sud – de quelques mètres et créé une nouvelle voie : l’avenue René Coty dans le prolongement de la rue Faidherbe, existante. L’idée directrice de Chomette, pour cette ZUP de Mons consistait à construire un centre-ville vertical, fort dense, symbolisé par , la résidence de l’Europe, regroupant les commerces et les services et, tout autour, des immeubles espacés de dimensions modestes (de 3 à 5 étages). Malheureusement, cette vision de l’urbaniste n’était guère compatible avec le principe de la rentabilité maximum et la nécessité de loger les nombreuses familles à la recherche d’un logement. Coty avec ses huit étages était dans la moyenne. Avec ses 120 mètres de longueur, 96 logements, ce n’était pas un record, mais, néanmoins, c’était un imposant monstre de béton. Pour les nouveaux arrivants des années 1960, ce lieu aujourd’hui si décrié, était plutôt un paradis. Cela changeait les locataires des quartiers insalubres des Bois-Blancs où de Saint-Sauveur où ils vivaient auparavant. Les appartements étaient vastes, pourvus de toutes les commodités dont une salle de bain, un centre commercial à quelques dizaines de mètres où l’on trouve de tout. 

Avec le temps, les bouleversements de l’économie, l’évolution des mentalités, on a vu apparaître dans ces nouveaux quartiers des problèmes préoccupants. D’autre part, le bâtiment devenait vétuste et sa rénovation était coûteuse notamment à cause de l’utilisation de l’amiante, un matériau isolant, bon marché mais dangereux pour la santé. Sa dépollution est encadrée par des normes drastiques. Les programmes de rénovation de ces anciens quartiers pouvaient prétendre à des financements des collectivités locales et de l’Etat. Cela ouvrait de nouvelles possibilités de transformation en profondeur de ces quartiers septuagénaires. C’est ainsi que la démolition de l’immeuble Coty a été actée. Elle permettra une nouvelle organisation de l’espace urbain situé à l’ouest de l’avenue. Pas question de faire imploser l’immeuble comme au bon vieux temps des années 1980, où La Manivelle, un paquebot urbain fut mis à bas. Cela produisait un spectacle grandiose que plébiscitait la population. Malheureusement, cela engendrait aussi un grand nuage toxique de béton et d’amiante, peu favorable à la santé du public. C’est la raison pour laquelle cette technique expéditive et spectaculaire est désormais interdite. 

Pour démolir Coty on utilisera une « grignoteuse », un monstre aux mâchoires d’acier qui permet de déconstruire, mur par mur. Le Chantier a débuté le 13 septembre 2023, Il n’a pas réuni la majorité de la population de la ville comme ce fut le cas pour la Manivelle, mais a tout de même été l’occasion d’une grande fête avec petits fours et discours officiels qui a mobilisée nombre de riverains et d’anciens habitants de la « Barre ». La technique du grignotage consiste à détruire trois rangs de fenêtres à la fois, d’évacuer, les déblais puis de mettre à bas trois nouveaux rangs. Cela prend du temps. La déconstruction du dernier rang s’est déroulée les 15 et 16 novembre, soit plus de deux mois de chantier. 

Extrait du bulletin municipal…

La place est nette. Les élus ont quelques idées en ce qui concerne le futur programme de constructions et d’aménagement à partir du foncier dégagé. On parle de la construction de plusieurs « plots » dont une résidence de 40 appartements et d’autres à vocation économique. Mais, rien n’est définitivement fixé. L’aménagement de la zone fera l’objet d’un « concours » et rien ne devrait être construit avant 2027.

Coty n’est pas le seul immeuble du quartier ayant vocation à disparaître afin de  permettre la rénovation urbaine de l’ancienne ZUP. Les barres, « Bary 2 » et « Brune » devraient être abbatues très prochainement. Ces rénovations ont un coût pour la commune. On estime que ce sont 117 millions d’euros qui auront été engagés dans le cadre du NPNRU (nouveau programme national de renouvellement urbain) au terme des programmes. Nous serons en 2028.

16 novembre 2023.

La fête de du départ du chantier de la déconstruction de Coty, selon Vilogia, le bailleur propriétaire de l’immeuble…

Alain Cadet, journaliste
Alain Cadet, journaliste

Il a débuté dans la vie professionnelle comme enseignant. Après avoir coché la case du métier de photographe, il s’est orienté vers la réalisation de films documentaires, activité qui a rempli l’essentiel de sa carrière. Arrivé à la retraite, il a fait quelques films… mais pas beaucoup ! Les producteurs craignent toujours que, passé 60 ans, le réalisateur ait la mauvaise idée de leur faire un infarctus, ce qui leur ferait perdre beaucoup d’argent ! La suite a montré qu’ils se sont peut-être montrés un peu trop frileux, mais cela fait partie du passé. C’est ainsi que l’ancien réalisateur – un peu photographe, sur les bords – s’est mis à collaborer avec différents journaux. Il a aussi écrit des livres sur la guerre de 1914 – 1918 où l’image a une place importante. C’est ainsi que dans ce blog, on trouvera beaucoup d’articles sur des peintres ou des photographes anciens ou contemporains, des textes relatifs aux deux guerres, mais aussi des articles opportunistes sur différents événements. Comme les moyens du bord sont très limités, cela a obligé l’auteur à se remettre à la photographie – sa passion de jeunesse – pour illustrer ses textes. Il ne s’en plaint pas !

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