Le Règlement des écoles primaires du Nord sous le Second empire, 1856

Le Règlement des écoles primaires du Nord sous le Second empire, 1856

La loi Falloux du 15 mars 1850, n’est pas du goût de tout le monde. C’est un retour en arrière qui donne tout pouvoir aux congrégations religieuses. Une femme git a terre, entravée. On peut lire : Séminaire, Inquisition, Obscurantisme, Intolérance . Thiers pose une pierre sur son estomac On chasse un instituteur laÏque d une école primaire au profit d’un religieux, On fouette un enfant. On brûle les oeuvres des philosophes et des pédagogues. Un résumé satyrique de la loi Falloux et de ses effets sur l’Ecole française.

Sous le Second empire on ne badinait pas avec le règlement. Chaque année, les instituteurs et les institutrices recevaient de la plume du préfet et de l’inspecteur d’Académie, un vade-mecum des droits et des devoirs de l’enseignant, qu’il leur fallait respecter à la lettre avec une rigueur quasi-militaire.

Résumé des épisodes précédents :

Après la loi Guizot (1833) qui instituait une Ecole Normale dans chaque département et une attention portée à l’enseignement primaire, la loi Falloux (1850) est un retour en arrière. La IIe République portée un instant par un désir de liberté devient vite un régime autoritaire sous le contrôle de Louis Napoléon Bonaparte, le président de la république. Il s’appuie sur « le Parti de l’Ordre » et les éléments les plus réactionnaires du clergé.  L’existence des Ecoles Normales ne dépend plus désormais que de l’éventuelle bonne volonté des Départements. Les prérogatives des instituteurs sont drastiquement réduites. Qualifiés de « demi-instruits », par les législateurs, on reproche à ces enseignants d’être trop compétents et de former des élèves ouverts d’esprit, éventuellement perméables aux idées socialistes. Désormais le rôle de l’instituteur sera surtout de donner une instruction religieuse rudimentaire aux élèves et d’être l’auxiliaire du curé de sa paroisse. Il devra aussi aborder quelques notions de base, en calcul, sciences et français. Ces lois portent le nom de l’Instruction Publique de l’époque, Alfred de Falloux mais elles ont été aussi amendées par le célèbre Monseigneur Dupanloup et par un ministre qui deviendra célèbre plus tard – y compris dans le domaine de l’instruction -, Adolphe Thiers.

NDLR : Eviter de lire l’article de Wikipédia sur les lois Falloux. L’esprit de Monseigneur Dupanloup y revient !

 Le texte de référence est le règlement de l’année 1856. Nous n’avons pas tout reproduit, seulement les passages les plus édifiants ou les plus surprenants pour un citoyen du XXIe siècle…Il définit l’application à l’échelon local des lois de mars 1850 et de juin 1854.

En tête du règlement on trouve les « devoirs particuliers de l’instituteur » : 

« Le principal devoir de l’instituteur est de donner aux enfants une éducation religieuse… de graver profondément dans leurs âmes le sentiment de leurs devoirs envers Dieu, envers leurs parents, envers les autres hommes et envers eux-mêmes.

Il doit instruire par ses exemples comme par ses leçons. Il ne se bornera pas à recommander et à faire prescrire les devoirs que la religion prescrit. Il ne manquera pas de les accomplir lui-même.

On ne le verra jamais dans les cabarets, dans les cafés, dans aucun lieu qui ne conviendrait point à la gravité et à la dignité de la fonction.

Il n’aura point de familiarité avec les enfants. Il s’abstiendra de les tutoyer. Il ne leur donnera jamais de noms injurieux. Il ne se laissera pas aller à la colère. Il saura toujours allier le calme à la douceur et la fermeté à la sévérité. »

Le règlement définit aussi le contenu des études à l’école primaire :

« Dans toute école primaire publique, l’instruction obligatoire comprend :

  • L’instruction morale et religieuse,
  • La lecture,
  • L’écriture,
  • Les éléments de la langue française,
  • Le calcul et le système légal des poids et mesures,
  • En outre, pour les jeunes-filles, les travaux d’aiguille… »

Les symboles de l’école publique :

« Un tableau indiquant l’emploi du temps sera affiché dans la classe,

Un Christ et un buste de l’Empereur seront placés dans la classe en vue des élèves,

Les classes seront toujours précédées d’une prière : celle du matin commencera par la prière du matin contenue dans le catéchisme du diocèse ; et celle de l’après-midi se terminera par la prière du soir du même catéchisme. A la fin de la classe du matin, on récitera la prière : Sainte Mère de Dieu, nous nous mettons sous votre protection. Au commencement de la classe du soir, on dira la prière : Venez, Esprit-Saint. »

L’instituteur, auxiliaire du curé :

« L’instituteur conduira les enfants aux offices, les dimanches, les jeudis et les jours de fêtes conservées, à la place qui leur aura été assignée par le curé ; il est tenu de les y surveiller. Toutes les fois que la présence des élèves sera nécessaire à l’église pour catéchisme, la communion et principalement à l’époque de la première communion, l’instituteur devra les y conduire. L’instituteur veillera particulièrement à la bonne tenue des élèves pendant les prières et exercices de religion, et il les portera au recueillement par son exemple. »

Les contenus de l’enseignement primaire :

« L’enseignement religieux comprend la lettre du catéchisme et les éléments d’histoire sainte. On y joindra chaque jour une partie de l’évangile du dimanche qui sera récité en entier le samedi. Il y aura une leçon de catéchisme chaque jour, même pour les enfants qui ont fait leur première communion. Les leçons d’instruction religieuse seront réglées sur les indications du curé de la paroisse. Aucun livre ne pourra être mis entre les mains des élèves s’il n’a pas été régulièrement approuvé. 

Une composition écrite, sur une des matières obligatoires, aura lieu chaque semaine. »

Le matériel pédagogique :

« Il y aura dans l’école au moins un tableau noir, destiné à des exercices d’écriture, d’orthographe, de calcul linéaire. Sur des tableaux mobiles appendus aux murs, seront tracées des maximes religieuses et morales, les mesures usuelles du système métrique, la table de multiplication, les cartes géographiques de l’Europe et de la France ».

Conditions d’admission :

« Pour être admis dans une école, les enfants doivent être âgés de sept ans au moins dans les communes pourvues d’une salle d’asile, de six ans au moins pour les autres, et de treize ans au plus. Nul enfant n’est admis à l’école s’il n’a pas été vacciné ou s’il a eu la petite vérole, s’il est atteint d’infirmités ou de maladies contagieuses. »

Hygiène :

« La salle de classe est balayée au moins une fois par jour ; les fenêtres sont ouvertes, même en hiver, pendant l’intervalle des classes. Avant la prière du matin, l’instituteur procède à l’appel nominal et à l’examen de propreté. Il ne peut être reçu dans la classe un plus grand nombre d’élèves que ne le comportent les dimensions du local, à raison d’un carré de huit décimètres de côté par élève. »

Récompenses et punitions :

« Les récompenses sont :

  • Les bons points,
  • Les billets de satisfaction,
  • L’inscription au tableau d’honneur,
  • Les places sur un banc d’honneur,
  • Les médailles,
  • Les prix,

Les punitions autorisées sont :

  • Les mauvaises notes,
  • La réprimande,
  • La retenue avec tâche extraordinaire, 
  • L’exclusion provisoire, 
  • L’exclusion définitive

Cette dernière sera prononcée par Monsieur l’Inspecteur d’Académie, après avis des autorités locales. Les punitions corporelles sont rigoureusement interdites. »

Congés :

« La durée annuelle des vacances est d’un mois. L’époque en sera déterminée par l’autorité départementale. Les congés ont lieu les dimanches et les jours de fêtes conservées, les jeudis après-midi, le premier jour de l’an, les jours de fêtes nationales, les lundis de Pâques et de la Pentecôte, le jour de fête communale. »

Mixité :

« Dans les écoles qui reçoivent des enfants des deux sexes, les garçons et les filles ne pourront jamais être réunis pour les mêmes exercices. Ils seront séparés par une cloison d’un mètre cinquante centimètres, au moins de hauteur, disposée de manière à ce que l’instituteur ait vue sur les deux côtés de la salle. L’entrée et la sortie auront lieu à des heures distinctes. L’intervalle sera d’un quart d’heure au moins. L’instituteur fait mettre les élèves en rang pour se rendre dans leurs familles. »

Le document date du 4 mars 1856 et il est signé du Préfet du Nord, Besson, et de l’Inspecteur d’Académie, Gisclard.

La messe est dite…

Alain Cadet, journaliste
Alain Cadet, journaliste

Il a débuté dans la vie professionnelle comme enseignant. Après avoir coché la case du métier de photographe, il s’est orienté vers la réalisation de films documentaires, activité qui a rempli l’essentiel de sa carrière. Arrivé à la retraite, il a fait quelques films… mais pas beaucoup ! Les producteurs craignent toujours que, passé 60 ans, le réalisateur ait la mauvaise idée de leur faire un infarctus, ce qui leur ferait perdre beaucoup d’argent ! La suite a montré qu’ils se sont peut-être montrés un peu trop frileux, mais cela fait partie du passé. C’est ainsi que l’ancien réalisateur – un peu photographe, sur les bords – s’est mis à collaborer avec différents journaux. Il a aussi écrit des livres sur la guerre de 1914 – 1918 où l’image a une place importante. C’est ainsi que dans ce blog, on trouvera beaucoup d’articles sur des peintres ou des photographes anciens ou contemporains, des textes relatifs aux deux guerres, mais aussi des articles opportunistes sur différents événements. Comme les moyens du bord sont très limités, cela a obligé l’auteur à se remettre à la photographie – sa passion de jeunesse – pour illustrer ses textes. Il ne s’en plaint pas !

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