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L’école d’Architecture de Lille du temps de Bernard Jumelle (1949-1965) 

Après-guerre, l’enseignement de l’architecture était très différent de ce qu’il est aujourd’hui. Bernard Jumelle, qui a suivi la formation de l’antenne lilloise de l’école d’Architecture, peut témoigner de cette époque.

« En réalité, cette école d’Architecture de Lille était une annexe de l’école des Beaux-Arts de Paris (section Architecture) », explique Bernard Jumelle.  « Chaque année, avait lieu le Concours national d’admission à l’école qui sélectionnait les 180 premiers élèves du territoire français. À Lille, il y avait 15 élèves qui rentraient chaque année. A la fin du cycle de formation, seulement trois, d’entre-eux étaient effectivement reçus C’était sensiblement la même chose dans les autres grandes villes françaises : Lyon, Marseille, Toulouse, Rennes…. Toutes les épreuves étaient identiques. Elles avaient lieu à la même heure.  Les copies étaient toutes corrigées à Paris, par un même jury. » Cette école d’Architecture était un lieu très sélectif. Y entrer était un exploit ! Mais, en sortir, diplôme en poche, représentait un véritable parcours du combattant. Pour autant, il n’était pas nécessaire d’avoir le Bac pour se présenter.

Pour prétendre intégrer l’école

il fallait d’abord réussir quatre épreuves dont chacune d’elle était éliminatoire. « L’épreuve d’architecture était redoutable »,témoigne l’ancien élève des Beaux-Arts : « Elle commençait le matin à huit heures, se poursuivait l’après-midi et se terminait le soir, à vingt heures.  L’élève disposait de douze heures de travail pour rendre sa copie. » Puis venait l’épreuve de dessin au fusain :  durée huit heures, quatre le matin, quatre l’après-midi ! Ensuite c’était le tour des mathématiques. « On n’exigeait pas un niveau extraordinaire à cette époque. C’était juste un cran au-dessus du niveau du Bac « Math’Elem ».  Mais, l’épreuve suivante, « la Géométrie descriptive »faisait beaucoup de dégâts. C’était une histoire de sphères, de cônes, de volumes parallélépipédiques qui s’entrecroisaient dans l’espace.  Cela demandait beaucoup d’habitude et d’agilité mentale. »

Si on avait réussi tout cela, On avait le droit de passer l’Oral, à Paris : Les étudiants devaient à nouveau plancher sur la Géométrie descriptive, les Mathématiques, l’Histoire de l’Architecture, l’Histoire de l’Art et surtout présenter le carnet des croquis réalisés les derniers mois. 

Si on était dans les premiers

on avait enfin le privilège d’intégrer l’école. Suivaient au moins dix années d’études intensives faites de matières scientifiques et artistiques, de bâtiments et de projets, dont le dernier – établi en dernière année – devait être de qualité suffisante pour pouvoir être construit. Avec ses trois années d’interruption pour raison de service militaire en Afrique du Nord, Bernard Jumelle mettra plus de quinze ans avant d’obtenir son diplôme de fin d’études.  L’essentiel du diplôme final d’architecte consistait à proposer un projet d’immeuble, prêt à construire.  Le jury n’examinait les propositions des candidats que s’ils avaient noirci au minimum seize mètres carrés de papier. En dessous, pour eux, ce n’était pas sérieux ! C’est en aidant José Segers un élève plus ancien à réaliser son projet d’établissement scolaire, le sujet de son diplôme de fin d’année, que Bernard Jumelle a trouvé son premier travail. Il a intégré, l’année suivante, le cabinet, que son collègue venait de créer dans le Vieux-Lille. Parmi les 15 élèves admis en même temps que lui seulement 5 obtiendront le diplôme final l « C’était une bonne année ! », s’amuse Bernard Jumelle…

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