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De Mons au Fort de Bondues : le retour de Lily vers les années de guerre
Lily est la fille de Jeanne Parmentier, résistante des deux guerres et fondatrice du journal La Voix du Nord. La fille de Jeanne était, elle aussi, membre du réseau. Elle a participé à la fabrication du journal, dès son premier numéro. Elle transportait la feuille clandestine ainsi que des armes et des documents destinés à Londres, dans un pot à lait truqué, accroché au cadre de son vélo.
Aujourd’hui, le Fort est devenu Musée de la Résistance. Ce voyage de Mons à Bondues, organisé par la direction du foyer des Bruyères (où elle réside désormais), à la date anniversaire du 18 juin est, pour elle, plus qu’une commémoration. C’est un retour vers son passé, sa jeunesse… une période douloureuse mais intense.
Devant le portrait du Général de Gaulle dans une pièce où un antique poste de radio, accroché au mur diffuse ce fameux appel du 18 juin (que très peu de monde a entendu en réalité), elle confie : « Quand on a vécu cette époque, on ne l’oublie jamais.» Le Fort est le témoin de l’histoire tragique de la France occupée. De mars 43 à mai 44, soixante-huit résistants ont été fusillées dans ses fossés. « Les Allemands l’occupaient pendant la guerre », explique Lily. « Bondues était un village très actif du point de vue de la Résistance. Il y circulait beaucoup d’armes et de renseignements ». Entre 1940 et 1942, Lily a fait la route de Mons jusqu’à la ferme Destombes, juste en face de l’aéroport. Celle-ci appartenait à une famille de patriotes et de résistants. Il suffisait à Monsieur Destombes de regarder par sa fenêtre pour connaître l’implantation des défenses antiaériennes et des avions qui bombardaient Londres. Chaque semaine, il en dessinait le nouveau plan qui partait pour l’Angleterre, via, Mons, bien caché dans le pot à lait de Lily.
L’ancienne résistante tient beaucoup à ce voyage. Cela fait des semaines qu’elle s’y prépare. « Ce sera probablement mon dernier plaisir », confiait-elle, quelques jours auparavant. « Ce qui me satisfait, c’est que je vais revoir ma mère. Il y a un portrait d’elle, accroché au mur. Je suis quasiment aveugle mais je sais, qu’intérieurement, je vais la voir ». Au bout d’un long couloir voûté où sont exposés les premiers numéros du journal clandestin, il y a un grand panneau avec les portraits des principales figures du réseau. On n’y voit effectivement Jeanne Parmentier mais aussi Lily, photographiée en 1941 par Raphaël Michkind, le photographe lillois à la mode. Lily a alors 24 ans. C’est une magnifique jeune femme. À cette époque, elle est secrétaire de direction. C’est elle qui va dactylographier les 20 premiers numéros de la Voix du Nord. Sous la dictée de Natalis Dumez, à son domicile, rue de Castiglione, à Fives, elle tape sur son Underwood, le premier numéro daté du 1er avril 1941. « C’est une période qui m’a beaucoup marqué », convient-elle. « J’y pense tout le temps… surtout à maman… aux autres aussi, Natalis Dumez, Jules Noutour et bien d’autres… Ils sont tous là, au fond de moi, et, pourtant, j’ai presque tout oublié ».
Lily est-elle une héroïne de la résistance ? Ce n’est pas ainsi qu’elle souhaite que l’on pose la question : «J’ai fait ce qu’il y avait à faire. Quand vous êtes dans le coup, vous ne pensez pas au danger. On est là où on doit-être ! Malgré tout, je sais pourquoi je l’ai fait. Je suis contente d’avoir pu rester française et j’ai bien travaillé pour cela ».