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Le tramway lillois, outil de modernisation de la Cité

En 1874, les premières lignes de tramway vont être déployées à l’intérieur de la ville. Cela va changer considérablement les conditions de mobilité des Lillois. Ce fut aussi l’occasion de moderniser la cité historique.

Dans la seconde moitié du XIXe siècle, le tramway est dans l’air du temps. Cette invention américaine a vu le jour, dès 1832, dans la ville de New-York. Elle a eu le temps de faire ses preuves et d’être imitée dans nombre de métropoles de chaque côté de l’Atlantique. A Lille, le premier projet de véhicule hippomobile sur rail date de 1855. Il sera suivi de nombreux autres : 1857, 1858, 1859, 1864, 1867, 1870. Mais il faudra attendre 1872 pour qu’enfin l’un d’entre eux trouve l’accord des élus lillois. Le projet va éclore en juin 1874.

Ce dossier de l’avènement du tramway, à Lille, fait partie d’une logique plus générale. La municipalité est soucieuse du développement de sa ville. Elle entend défendre bec et ongle l’hégémonie de la capitale des Flandres sur ce secteur urbanisé en pleine mutation, que l’on appelait à cette époque « Les Trois Villes » (Lille, Roubaix, Tourcoing). 

 Dès le milieu du XIXe siècle, il devient évident que la ville de Lille, confinée depuis des siècles dans son espace historique, a atteint ses limites.  Les nouveaux métiers textiles, venus d’Angleterre ne peuvent être installés dans les vieilles maisons lilloise du XVIIe ou du XVIIIe siècle.  D’ailleurs de nouvelles usines s’installent aux portes de la ville, comme les filatures Wallaert (1842), dans la plaine des Moulins, à quelques encablures du rempart Sud. Lille doit aussi faire face au développement et à l’ambition de ses voisines, Roubaix et Tourcoing. Ces gros bourgs, dopés par l’industrie lainière, sont devenus des villes prospères.  Ils menacent désormais la capitale des Flandres, qui depuis des siècles, était la grande référence régionale.  Les élus lillois vont faire flèche de tout bois. Ils ne lésinent pas sur les dépenses et sont prêts à entreprendre des réformes hardies.  

Projet de percement de la rue de la gare 1868

En octobre 1858, un décret impérial rattache à Lille quatre communes voisines : Esquermes, Moulins, Wazemmes, et Fives, dont Saint-Maurice des Champs.  Le territoire municipal passe ainsi de 411 à 2110 hectares. On va pouvoir démolir en partie l’ancien rempart et, plus au Sud, en construire un nouveau. Il englobe les territoires fraîchement industrialisés.  C’est l’occasion de revoir la ville de fond en comble.  Sur le territoire occupé par l’ancien rempart démoli et son no man’s land, vont pouvoir naître de nouveaux quartiers, des équipements publics tels que des universités ou des grandes écoles.  

Le centre-ville et ses quartiers périphériques, vont être modernisés. La vieille ville et son lacis de voies étroites, datant parfois du XVe siècle, sera partiellement démolie pour laisser la place à de grandes artères à la manière des voies haussmanniennes de Paris. Elles vont être mises en chantier, entre 1859 et 1870 : la rue Nationale, percée en 1862 ou la rue de la Gare, en 1869, qui deviendra la rue Faidherbe. Lille opère une véritable mutation du point de vue du transport des biens et des personnes.  Cette voirie fonctionnelle est un atout pour le développement du réseau de tramways.  Les lignes existantes couvrent une partie jugée insuffisante par les Lillois.  Ils admettent malgré tout que c’est un grand progrès.  La construction des voies nécessite le pavage des rues.  En sortant en ville, on trouvera moins de boue, mais plus de nuisances sonores. Le son des sabots ferrés des chevaux, battant les pavés au passage des fiacres des charrettes et des tramways va rythmer le nouvel univers urbain. Chaque ligne est desservie par quatre rames omnibus, ce qui garantit un passage tous les quarts d’heure.  

Porte de Tournai modifiée pour le passage du tramway

Malgré certaines difficultés financières, qui vont conduire la compagnie à se restructurer, ce tramway lillois est un grand succès.  Il contribue au développement des faubourgs situés de l’autre côté des remparts, au niveau des portes desservies. Des voix s’élèvent – notamment sous les toits du beffroi – pour demander de prolonger les lignes en direction de la banlieue.  Mais, l’enceinte militaire est un problème.  On accède en ville par des portes datant du XVIIIe siècle. Elles ont bien du mal à supporter le flux des charrettes et des chariots.  C’est pourquoi les élus lillois militent pour un démantèlement de l’enceinte militaire.  En attendant, d’avoir gain de cause, ils vont faire modifier la structure des antiques portes de la ville pour permettre le passage des rames du tramway. La vapeur, puis la traction électrique, vont augmenter vitesse et cadence. Le tramway va être le vecteur de la colonisation des campagnes. Elles vont se transformer en ville. Des travailleurs vivant à proximité d’un trajet urbain vont pouvoir se rendre indifféremment à Lille, à Roubaix ou à Tourcoing. Le tramway va contribuer au développement d’une importante métropole européenne au nord de la France.

Sujet Voisin : Le développement des gares

Lille, gares d’hier et d’aujourd’hui : I/II

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