Paroles d’une Résistante, II, Lily Glück-Parmentier,1917 – 2014

Paroles d’une Résistante, II, Lily Glück-Parmentier,1917 – 2014

Contexte : Nous sommes à la mi-juin 2013. Lily Glück-Parmentier, la fille de Jeanne Parmentier, Résistante de la seconde Guerre mondiale, se trouve à l’EPHAD des Bruyères de Mons-en-Barœul. Elle y est entourée d’un personnel dévoué. Cela n’a rien à voir avec les récits épouvantables de la vie dans les EPHAD privés de type ORPEA ou KORIAN dont les médias se font l’écho, aujourd’hui. Il est venu à Lily l’idée d’une visite pour les pensionnaires des Bruyères au Musée de la Résistance de Bondues. Un couloir y est consacré au réseau Voix du Nord, où l’on retrouve son portrait ainsi que celui de sa mère, Jeanne Parmentier. Le directeur de l’époque, Arnaud Rousseaux a organisé la visite en un tournemain et Lily était plutôt fière de pouvoir partager avec les autres pensionnaires ce sujet qu’elle connaissait si bien. 

Entretiens des 14 et 17 juin 2013 (extraits)

« Ce sera sans doute mon dernier plaisir. Je vais revoir ma mère. Il y a un très grand portrait d’elle, accroché au mur. Je ne vois plus grand-chose et je ne sais pas si je pourrais distinguer quoique ce soit. Mais à l’intérieur de moi, je la verrai. Ma mère était quelqu’un d’exceptionnel. Il y a aussi Casimir qui devrait venir pour faire la visite. Maintenant c’est une vieille personne… mais moins que moi qui ai 96 ans. Quand je l’ai connu, pendant la guerre, c’était un gamin. Il était toujours en culottes courtes. C’est un détail un peu bizarre parce que maintenant, c’est quelqu’un de respectable du Conseil municipal de Bondues.  Pendant la Guerre, j’ai fait ce qu’il y avait à faire. Quand vous êtes dans l’action, vous ne pensez pas au danger. On est là où on doit-être ! Pour Maman c’était différent ! Elle agissait par conviction. Elle détestait les allemands. À dire vrai je ne les aimais pas beaucoup non plus ! Cette période m’a beaucoup marqué. J’y pense tout le temps… à maman… aussi aux autres Natalis Dumez ou Jules Noutour. Ils sont toujours là ! Et, pourtant, j’ai presque tout oublié…

Le musée de la résistance est à Bondues, c’est un ancien Fort.

Les allemands l’occupaient pendant la guerre. C’était terrible ! C’était aussi un village où il s’est passé beaucoup de choses du point de vue de la Résistance. Il y avait des armes qui circulaient ainsi que beaucoup d’informations et de renseignements. Je m’y rendais toutes les semaines. J’avais un pot à lait, accroché à mon vélo. En fait, il y avait juste une coupelle avec du lait au-dessus et dessous c’était creux. On y rangeait des papiers et des journaux. On n’est plus beaucoup aujourd’hui. J’ai 96 ans et je suis malade.  La plupart des autres sont morts. Bientôt il ne restera plus personne. Je crois que je me suis engagée à cause de maman. Je l’admirais beaucoup. Elle m’a dit : « Tu as fini tes études et ton mari est à la guerre ! Tu peux le faire ! » Aujourd’hui ce n’est plus du tout la même chose, la même mentalité. Il y a un fossé qui s’est creusé entre les jeunes i d’aujourd’hui et ceux de ma génération. Je suis contente d’avoir pu rester française et j’ai bien travaillé pour ça.  Les parents de Casimir, la famille Destombes étaient agriculteurs à Bondues. Leur ferme était juste à côté du terrain d’aviation. Ils étaient aux premières loges pour savoir quels étaient les avions sur place – particulièrement les bombardiers – là où on les range et comment on essaie de les camoufler. Chaque semaine, monsieur Destombes mettait à jour le plan du terrain d’aviation. Je le ramenais à Mons caché dans mon pot à lait et le donnais à maman. En 1942, je suis partie rejoindre mon mari et c’est maman qui venait à Bondues en vélo. Une fois elle a même ramené une mitraillette, accompagné de Casimir. C’est quelque chose de très risqué car la route de Bondues à Mons-en-Barœul est très longue.  Ce n’est pas facile de cacher une mitraillette. Heureusement, ils n’ont rencontré aucune patrouille allemande. C’était sans doute un risque excessif ! »

Retrouver un autre entretien de Lily :

Paroles d’une Résistante, Lily Glück-Parmentier, 1917 – 2014

Alain Cadet, journaliste
Alain Cadet, journaliste

Il a débuté dans la vie professionnelle comme enseignant. Après avoir coché la case du métier de photographe, il s’est orienté vers la réalisation de films documentaires, activité qui a rempli l’essentiel de sa carrière. Arrivé à la retraite, il a fait quelques films… mais pas beaucoup ! Les producteurs craignent toujours que, passé 60 ans, le réalisateur ait la mauvaise idée de leur faire un infarctus, ce qui leur ferait perdre beaucoup d’argent ! La suite a montré qu’ils se sont peut-être montrés un peu trop frileux, mais cela fait partie du passé. C’est ainsi que l’ancien réalisateur – un peu photographe, sur les bords – s’est mis à collaborer avec différents journaux. Il a aussi écrit des livres sur la guerre de 1914 – 1918 où l’image a une place importante. C’est ainsi que dans ce blog, on trouvera beaucoup d’articles sur des peintres ou des photographes anciens ou contemporains, des textes relatifs aux deux guerres, mais aussi des articles opportunistes sur différents événements. Comme les moyens du bord sont très limités, cela a obligé l’auteur à se remettre à la photographie – sa passion de jeunesse – pour illustrer ses textes. Il ne s’en plaint pas !

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