Guerre des ondes : Le « Syndrome de La Havane » ou le tango cubain

Guerre des ondes : Le « Syndrome de La Havane » ou le tango cubain

« J’ai vu des adolescents de 15 ans avec un syndrome confusionnel évoquant une maladie d’Alzheimer. »

Docteur Dominique Belpomme, à BFM


Un mal mystérieux frappant les diplomates et / ou espions américains de l’ambassade de La Havane, défraye la chronique et revient périodiquement à la Une de l’actualité

Connaissez-vous le tango cubain ?

C’est très simple. On fait un pas en avant, puis deux pas en arrière, puis un pas en avant et deux nouveaux pas en arrière et… ainsi de suite. A la fin, on a effectué un tour complet de la piste et l’on se retrouve au point de départ. Le plus beau de tous les tangos cubains, c’est celui du « Syndrome de La Havane ». Sa partition a été écrite puis sans cesse réorchestrée par la prestigieuse Central Intelligence Agency. La dernière version vient d’être publiée conjointement par des journalistes de « der Spiegel », « The Insider » et « 60 minutes – CBS ». La veille de la parution, Roman Dobrokhotov, le rédacteur en chef de « The Insider » – un journal d’opposition au régime russe basé en Lettonie –  faisait l’annonce de son nouveau dossier : « Lisez notre enquête cette nuit, vous verrez, c’est mieux qu’une série Netflix ».  En effet, la publication ressemble à une aventure de James Bond, sauf qu’elle n’a rien d’une fiction pour les malheureuses victimes de ce mystérieux phénomène. 

A partir de l’année 2016, les personnels des ambassades américaine et canadienne de la Havane sont atteints de symptômes inexplicables : acouphènes, troubles auditifs, troubles de la vision, vertiges, problèmes cognitifs, insomnies et même dans certains cas, cancers ! On va appeler ce phénomène très inquiétant, le « Syndrome de La Havane ». D’après cette nouvelle enquête internationale, documentée par des spécialistes acousticiens et d’anciens membres de l’Agence américaine, des agents de la CIA et du FBI ont été attaqués à l’aide d’une arme sonique utilisant les technologies des micro-ondes. Ils n’hésitent pas à désigner le coupable :  la Russie et son service de renseignement militaire, le G. R. U. 

Cette version (avril 2024) est en totale contradiction avec les conclusions officielles de l’Agence (mars 2023) qui avait communiqué dans la presse qu’il était « très improbable » qu’une puissance étrangère soit à l’origine de ces troubles. Cette mouture était elle-même la négation de versions précédentes comme celle du Havana Act (Helping American Victims Afflicted by Neurological Attacks) d’octobre 2021. Il a été approuvé à l’unanimité par les deux chambres composées de Républicains et de Démocrates. A cette occasion, le président américain, Joe Biden écrira : « Aujourd’hui, j’ai eu le privilège de promulguer le HAVANA act, afin de répondre aux besoins du personnel du gouvernement américain. Des fonctionnaires, des agents du renseignement, des diplomates et des militaires dans le monde entier ont été touchés…Certains sont aux prises avec des lésions cérébrales débilitantes qui ont réduit leur carrière au service de notre nation. Nous mettons à contribution toutes les ressources du gouvernement américain pour mettre à la disposition des personnes touchées des soins médicaux de qualité et pour faire toute la lumière sur ces incidents, notamment pour déterminer la cause et qui en est responsable. » Ce « Syndrome de La Havane » est une bien mystérieuse affaire. Les communications contradictoires entretiennent doute et incertitudes. Mais, ce qui est certain, c’est qu’au moins, l’une de ces deux versions est fausse. Bien entendu, sur fond de guerre entre les Etats-Unis d’Amérique et la Russie – par Ukrainiens interposés – on peut penser que cette polémique vient à point nommé. Mais la thèse de cette équipe internationale de journalistes est confortée par la littérature des usages supposés d’armes ultra-soniques. Plusieurs ouvrages documentent les études effectuées, dès les années 1950 par les Etats-Unis, l’URSS, suivis par la Chine. 

En 1953, déjà, les employés de l’Ambassade américaine, boulevard Novinsky à Moscou, avaient développé un mal mystérieux, très voisin de celui de la Havane. Après une longue enquête, les experts détachés sur place vont déterminer que l’origine du phénomène provient d’une antenne récemment installée sur le toit d’un immeuble voisin. Elle émet en permanence des ondes de haute fréquence comprises entre 2.5 et 4 gigahertz. C’est ce qu’on va appeler « le signal de Moscou (Moscow signal). Aucune des deux parties ne va vouloir contester les faits. On notera au passage que, ce sont justement ces fréquences toxiques qu’utilisent de nos jours les opérateurs privés : 2,4 et 5 gigahertz pour les box(es) grand public et de 700 mégahertz à 3,5 gigahertz pour les antennes-relais. Des épisodes voisins vont se produire dans différents endroits du Globe : en Russie, en Angleterre, en Allemagne et même en France !

A La Havane, ce sont environ 200 personnes liées à la mission américaine qui seront concernées. Dans le même temps, 14 membres de la délégation canadienne vont être frappés du même mal mystérieux. En 2022, le New-York Times avance le chiffre de plus de 1000 Américains, impactés par le syndrome de la Havane au cours de ces dernières décennies. Il ne fait aucun doute que la CIA ne connaisse la vérité. Un ingénieur radio compétent bien équipé est capable de déterminer les fréquences et les puissances des signaux éventuellement émis. Dans l’hypothèse où cette nouvelle enquête de la presse serait fondée, cela soulève plusieurs questions brûlantes. Si l’Administration américaine a bien reconnu l’existence de problèmes liés aux ondes, le gouvernement canadien est resté dans le déni. Il a géré cette crise comme celle des victimes civiles des ondes du commerce. Dix-huit anciens diplomates, jadis en poste à Cuba lui réclament des millions de dollars. Une médiation est en cours. Si on accepte l’idée qu’arme utilisant la technologie des micro-ondes, soit la cause de leurs symptômes, cela pourrait changer le cours de la procédure et coûter très cher au gouvernement canadien.

Surtout, cela voudrait dire que les ondes non ionisantes sont susceptibles de provoquer des pathologies handicapantes. Cela va à l’encontre des théories de l’ICNIRP (Commission internationale de protection contre les rayonnements non ionisants) selon laquelle les ondes non ionisantes n’ont pas une énergie suffisante pour expulser un électron de son orbite péri-atomique. Seuls, les effets thermiques des radiations pourraient avoir une incidence sur la santé des êtres vivants. Cet institut privé composé essentiellement de physiciens s’est auto-institué expert international dans le domaine des ondes. Il se définit comme scientifique et indépendant mais ses dirigeants sont ou ont été en liaison financière avec les industriels des ondes. Si on valide cette théorie, il est possible d’empiler sans aucun principe de précaution les technologies des ondes et les objets connectés. C’est ce qui s’est réalisé dans la pratique dans tous les lieux développés de la planète : antennes-relais, smartphones, Wifi, Buetooth, 3, 4, 5G, compteurs et objets connectés, etc.

Les radiations produites sont un trillion de fois supérieures à celles qui existaient en 1950.

Cela n’émeut personne. Ce postulat est reproduit comme l’évangile dans la presse généraliste et médicaleL’ICNIRP et ses alliés sont aussi parvenus à imposer leurs théories aux instances politiques et aux différentes sociétés médicales et agences de santé telles que l’ANSES, malgré une foule de travaux indépendants alertant sur les dangers de la pollution électromagnétique. Surtout, l’ICNIRP a réussi à étendre son influence sur la commission idoine de l’Organisation Mondiale de la Santé, chargée d’éclairer les politiques des Etats dans le domaine de la santé. Au début des années 2000, l’OMS embauche Michael Repacholi, un directeur de l’ICNIRP. Il sera chargé désormais du projet international CEM (champs électromagnétiques) et coordinateur de l’Unité rayonnement et hygiène du milieu. Il reste encore, aujourd’hui, président émérite de l’ICNIRP. Cette proximité de l’ICNIRP et de la commission de l’OMS sur les radiofréquences et les champs électromagnétiques laisse beaucoup de chercheurs et d’observateurs circonspects.

Ainsi Joel Moskowitz, enseignant chercheur de l’Université de Berkeley dans le domaine de la médecine et de la santé et auteur de plusieurs études sur les effets des champs électromagnétiques écrit (La Maison du XXIe siècle, août 2023) : « L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a annoncé le nom des 21 experts sélectionnés pour faire partie du groupe d’étude des risques pour la santé des champs électromagnétiques (CEM) de radiofréquences (RF). Ces personnes sont chargées d’examiner dix rapports de recherche et de formuler des recommandations pour la monographie sur les champs de radiofréquences et les risques pour la santé. Onze des 21 personnes sont actuellement ou ont été affiliées à l’ICNIRP. » Et l’éminent professeur américain de poursuivre : « Aucun des 250 scientifiques spécialistes des CEM qui ont signé l’Appel international des scientifiques spécialistes des CEM  n’a été sélectionné par l’OMS pour faire partie du groupe de travail.  Il n’est pas étonnant qu’une grande partie du public se méfie de l’OMS, si c’est ainsi que l’agence procède pour « améliorer sa gestion des conflits d’intérêts et renforcer la confiance du public et la transparence ».

L’enquête des journalistes de « der Spiegel », « The Insider » et « CBS » relance le débat sur le danger des ondes électromagnétiques. Si, par ce moyen, on peut rendre artificiellement malade les personnels des ambassades occidentales à Cuba, c’est que les radiations des CEM sont potentiellement toxiques pour le public. Nous serions tous des employés des ambassades américaines et canadiennes de La Havane. Des centaines de millions de personnes, de par le Monde, se plaignent de symptômes handicapants qu’elles attribuent à l’effet des radiations. Elles voudraient bien connaître le fin mot de cette ténébreuse affaire du « Syndrome de la Havane ».

Sujet voisin :

Les ondes électromagnétiques sont-elles dangereuses pour la santé humaine ? La preuve par le « syndrome de la Havane » !

 

Alain Cadet, journaliste
Alain Cadet, journaliste

Il a débuté dans la vie professionnelle comme enseignant. Après avoir coché la case du métier de photographe, il s’est orienté vers la réalisation de films documentaires, activité qui a rempli l’essentiel de sa carrière. Arrivé à la retraite, il a fait quelques films… mais pas beaucoup ! Les producteurs craignent toujours que, passé 60 ans, le réalisateur ait la mauvaise idée de leur faire un infarctus, ce qui leur ferait perdre beaucoup d’argent ! La suite a montré qu’ils se sont peut-être montrés un peu trop frileux, mais cela fait partie du passé. C’est ainsi que l’ancien réalisateur – un peu photographe, sur les bords – s’est mis à collaborer avec différents journaux. Il a aussi écrit des livres sur la guerre de 1914 – 1918 où l’image a une place importante. C’est ainsi que dans ce blog, on trouvera beaucoup d’articles sur des peintres ou des photographes anciens ou contemporains, des textes relatifs aux deux guerres, mais aussi des articles opportunistes sur différents événements. Comme les moyens du bord sont très limités, cela a obligé l’auteur à se remettre à la photographie – sa passion de jeunesse – pour illustrer ses textes. Il ne s’en plaint pas !

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